Aga

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Aglagla, Aga ne jette pas un froid.

Vrai-faux documentaire

Présenté comme un documentaire, notamment le début du film qui plante le décor et la vie ans le grand froid Iakoute, Aga démontre la parfaite maestria du réalisateur bulgare, Milko Lazarov, à qui l’on doit de nombreuses coproductions de documentaires et un premier long-métrage, Aliénation, qui a reçu divers prix de l’académie bulgare du cinéma. Aga est donc son deuxième long métrage et c’est une grande réussite qui parvient à dresser le portrait d’une famille Iakoute dans sa vie de tous les jours, mais surtout à raconter une histoire qui est celle qui nous concerne tous : le changement de société, la perte des traditions et des repères, mais sans insistance redondante, ni sentimentalisme trop appuyé.

 

 

La vie de tous les jours

À la cinquantaine, Nanouk et Sedna vivent en harmonie le quotidien traditionnel d’un couple de Iakoutes. La caméra de Milko Lazarov les suit dans leur tâches régulières, scandées par le poids de la tradition qui a bercé depuis toujours leurs ancêtres. La pêche est montrée dans toute sa simplicité mais aussi dans la magie de pouvoir faire cuire le poisson, le partager méticuleusement et remercier le ciel d’être en vie. C’est un film plein de grâce et qui participe à rendre des actions de grâce à cette nature si généreuse envers nous et que les Occidentaux ne respectent plus assez, comme si tout leur était dû. Tous les acteurs du film sont professionnels, hormis Feodosia Ivanova qui joue le rôle de Sedna et qui vit au beau milieu de la Sibérie, dans la taïga où elle élève des vaches. « Elle est non professionnelle, précise le metteur en scène dans le dossier de presse. Toutefois, je l’avais vue dans un film amateur tourné dans la région par son neveu, ce qui m’a convaincu de l’engager. » Et il a eu raison, malgré les réticences de Feodosia, car elle fait merveille et semble vraiment très à l’aise devant la caméra. Il faut dire aussi que l’équipe a dû faire face à un froid terrible, non seulement pour tenir le coup à des températures avoisinant parfois les -42° et stationnaires autour de -30°, mais aussi pour éviter que la caméra et ses huiles de rouage ne gèlent. Il faut dire que le film est tourné, non pas en numérique, mais en argentique 35mm. Les rushes ont été envoyés tous les soirs au développement à Moscou. Quant au plan final, le réalisateur n’ayant pas pu le tourner lorsqu’il s’y trouvait pour des raisons météorologiques, il a été obligé d’y renvoyer une équipe pour pouvoir le filmer et terminer ce magnifique film.

Outre la peinture de la vie quotidienne, le film excelle à nous présenter des paysages extrêmes, où la neige a parfois tendance à se fondre avec le ciel dans cette sorte de paradis blanc que, peu à peu, la civilisation s’emploie à détruire, ne serait-ce que par le délitement de la structure familiale ou l’industrialisation qui s’installe aux alentours et que dépeint de façon comique le voyage en camion.

 

 

Hommage avoué à Flaherty

En effet, le couple ne revoit plus sa fille partie travailler comme cadre à la mine de diamant, et leur jeune fils vient rarement partager la yourte avec eux. Et, s’il le fait, c’est un peu à contrecœur sans se départir de ce petit poste de radio qui le relie au monde dit « civilisé ». Récompensé par de nombreux prix de par le monde, Aga appelé ainsi en raison du prénom de leur fille, et qu’on ne découvrira pourtant qu’à la toute fin du film, est un bel hommage à la nature, au froid, au courage et nous offre, en creux, le portrait d’un chien de traîneau adorable qu’on aimerait adopter et qui contribue, lui aussi, à rendre un vibrant hommage au film légendaire de Robert J. Flaherty, Nanouk l’Esquimau (1922).

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Durée : 97 mn


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